L’écriture libyque a persisté jusqu’à la conquête espagnole à Tenerife selon une étude

La pratique du libyque aurait continué jusqu’à la conquête par la Couronne d’Espagne des Îles Canaries. C’est ce que suggère un nouvel article paru ce mois de décembre 2024 à la Cátedra Cultural de Estudios Bereberes de la Universidad de La Laguna (ULL), co-écrit par Irma Mora Aguiar, spécialiste en épigraphie libyco-berbère et professeur à l’Universidad Europea de Canarias, membre de la SHNA, et Renata Ana Springer Bunk.

Renata Springer et Irma Mora, épigraphistes de la Cátedra Cultural de Estudios Bereberes de l’Universidad de La Laguna, ont publié récemment dans le dernier numéro de Paleohispánica: revista sobre lenguas y culturas de la Hispania Antigua un article intitulé « Estudio de las inscripciones líbico-bereberes en la isla de Tenerife ». Cette recherche apporte de nouveaux éclairages sur les relations entre les Guanches et les Européens, tout en détaillant des traits phonétiques qui pourraient indiquer la persistance de l’utilisation de l’écriture libyco-berbère à Tenerife jusqu’à l’époque de la conquête.

L’étude se concentre sur l’analyse de sept inscriptions libyco-berbères documentées à Tenerife, dont trois ont été découvertes grâce à l’Inventario de inscripciones alfabéticas en el ámbito rupestre canario, un projet développé en 2016 et financé par la Direction Générale du Patrimoine Culturel des Canaries. En adoptant une approche pluridisciplinaire, les autrices approfondissent des aspects tels que les supports, les contextes archéologiques et les textes, offrant ainsi de nouvelles perspectives sur ces manifestations épigraphiques.

Parmi les résultats les plus marquants, Mora et Springer identifient des graphèmes affectés par des superpositions de gravures et évoquent la possible connexion de l’une des inscriptions avec une scène chrétienne. Ce constat ouvre de nouvelles pistes d’interprétation sur l’interaction culturelle entre les Guanches et les Européens. L’article souligne également la relation spatiale entre les inscriptions, les atalayas (tours de guet) et les chemins traditionnels, tout en mettant en évidence un lien culturel entre l’écriture et des gravures à iconographie libyco-berbère.

L’analyse des inscriptions révèle aussi des découvertes significatives, notamment l’identification de morphèmes grammaticaux et un phénomène dialectal – l’aspiration de la « t » initiale – déjà reconnu dans la toponymie guanche par le philologue Jonay Acosta, également membre de cette chaire. Ce trait phonétique, apparemment tardif, ainsi que la possible association d’une inscription à des motifs chrétiens, suggèrent la persistance de l’utilisation de l’écriture libyco-berbère à Tenerife jusqu’à la conquête espagnole.

Le contenu de cette recherche a été présenté le 18 décembre dernier lors de la conférence de clôture du cycle « Huellas Bereberes en Canarias », organisé par la Cátedra Cultural de Estudios Bereberes et la Real Sociedad Económica de Amigos del País de Tenerife. Intitulée « Inscripciones guanches », cette conférence, disponible sur YouTube, a été animée par Irma Mora, qui a exposé les principales conclusions de ce travail.

La Cátedra Cultural de Estudios Bereberes est affiliée au Vice-rectorat de la Culture et de l’Extension Universitaire de l’Universidad de La Laguna. Sa mission est la recherche et la diffusion du patrimoine culturel canarien d’origine nord-africaine, notamment présent dans la langue et les évidences archéologiques préeuropéennes.

Lu sur Universidad de La Laguna

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